RAPPORT D’ACTIVITÉ 2018-2019

Amitié et Développement Rapport moral et financier 2018-2019

                                                                                     

Activité 2018-2019

 

 

 Les activités sur les douze derniers mois

 

Lors de notre dernier rapport moral qui vous avait été envoyé à la fin de l’année 2018, nous vous avions fait part de nos inquiétudes au sujet de la situation sécuritaire du Burkina Faso, inquiétudes que nous vous confirmions dans une note envoyée en mars 2019 et dans laquelle nous vous donnions deux informations importantes :

1) Nous renonçons à notre voyage annuel 2019.

2) Nous continuerons nos interventions sur l’année 2019 comme à l’habitude en espérant que la situation s’améliorera suite aux mesures prises par le gouvernement burkinabé.

 Notre souci premier, en effet, a été d’éviter pour nos bénéficiaires ce que nous pourrions appeler la double peine : l’insécurité et l’arrêt des programmes d’aides.

Nous nous sommes donc conformés à ce programme et nos interventions ont été aussi nombreuses que par le passé et se sont déroulées de manière satisfaisante avec nos partenaires traditionnels et en qui nous avons pleinement confiance.

Nous avons donc investi au total une somme du même ordre de grandeur que pendant  l’année 2018, à savoir 72 402€ contre 82 763 € en 2018 qui ont concerné les activités suivantes :

Dans la mesure où, comme nous vous l’avions indiqué dans les rapports précédents,  nous voulons dans les limites du possible prioriser l’apprentissage qui favorise l’emploi des jeunes, nous y avions consacré, l’année dernière, une somme significative (34K€) en investissant dans des achats de matériel de broderie et de tissage pour le programme tri annuel de formation des filles de la brousse à Diebougou.

Et cette année, nous avons eu le plaisir de récolter les fruits de nos investissements passés avec un développement significatif de l’activité broderie et tissage chez les filles de Diebougou (SO du Burkina) et, comme nous leur avions financé une boutique sur le marché, elles ont pu commercialiser leur production.

Nous avons aussi continué pour la 3eme année à financer (16K€) ce programme qui allie enseignement général de base et apprentissage dans les métiers de broderie, tissage, élevage (moutons, cochons) horticulture (jardin potager). Le but est d’en faire des femmes compétentes et surtout capables d’autonomie dans un pays  dont les coutumes ne les favorisent guère.

Toujours lié à l’apprentissage mais aussi à l’accès à l’eau et toujours à Diebougou, comme nous vous en avions informés l’année dernière,  nous avons financé cette année ce forage avec alimentation solaire pour le futur centre de métiers pour les jeunes des rues qui devrait accueillir plusieurs dizaines d’apprentis. Une autre association en a financé le château d’eau. Cette initiative  vient  des Frères de saint Vincent de Paul ; l’un d’eux, récemment ordonné, l’ abbé Laurent Somda, s’occupe beaucoup des jeunes à Bobo Dioulasso et à Diebougou. A Bobo, il organise et gère un  patronage avec plusieurs dizaines de jeunes et nous l’avions aidé l’année dernière (voiture de transport de jeunes et réparation de pompe pour le forage du patronage). Autour de Diebougou, il y a de nombreuses mines d’or exploitées de manière sauvage et les jeunes désoeuvrés et sans ressource y vont risquer leur vie (ils peuvent s’acheter une moto en un temps record comparé à d’autres activités bien moins rémunératrices). En effet, il y a de nombreux accidents (effondrement des trous) et les vapeurs de cyanure les intoxiquent à la longue. Nous soutenons donc beaucoup les initiatives qui vont à l’encontre de tout cela.

Concernant l’accès à l’eau mais aussi l’équipement sanitaire, la priorité des priorités dans ce pays, nous avons eu la grande satisfaction de voir notre dossier de demande de subvention pour un programme d’équipement de cinq villages en forages et latrines (par village, 1 forage et 10 latrines) accepté par la Métropole de Lyon à qui nous exprimons notre reconnaissance. C’est le second programme en 4 ans qui est accepté. Le montant total du second programme est de 80K€, la subvention de 64K€, le solde (16K€) étant financé sur nos fonds propres.

Il faut souligner que l’obtention de cette subvention n’était pas évidente. Deux points ont joué en notre faveur : le bon déroulement technique, financier et comptable du programme précédent et surtout, compte tenu de la déstabilisation du pays, le fait que nous avons prouvé que nous disposions de relais fiables et compétents sur place pour mener à nouveau à bien le programme. Nos interlocuteurs nous ont dit que, sans cela, nous n’aurions pas eu la subvention. Un premier paiement (15K€) concernant ce programme a été réalisé en juillet dernier et les prospections ont déjà commencé.  

Concernant l’enseignement général, alors que certaines années, nous intervenions sur plusieurs sites en primaire ou secondaire, nous nous sommes limités, cette année, à compléter l’investissement dans le nouveau bâtiment de la fameuse école de Goundri à Ouagadougou et à renouveler une partie du stock des bancs et chaises.

Cette école que nous suivons depuis de nombreuses années était une école primaire au début puis est devenue une école secondaire, grâce aussi notamment au programme d’éducation des filles initié par cette fondation allemande Tua Res. Ce programme qui doit mener ces filles de la sixième jusqu’au baccalauréat sera poursuivi jusqu’à son terme mais ne sera pas renouvelé selon nos informations.

Cette école accueille des enfants très pauvres de la banlieue de Ouaga. C’est la raison pour laquelle Tua Res l’avait retenue dans son programme de développement des filles. Tua Res finance la scolarité mais aussi la vie quotidienne des filles (nourriture, vêtements, fournitures scolaires) pour leur donner le maximum de chances de réussir leurs études et de les mener jusqu’à terme. 

Ce partenariat entre l’école de Goundri et Tua res durera le temps d’un cycle complet amenant les filles de la sixième jusqu’au baccalauréat. Les dirigeants de l’école devront alors, pour la suite,  s’adapter, comme ils ont commencé déjà à le faire, en trouvant de nouveaux élèves capables de payer leur scolarité et de subvenir à leurs propres besoins. Nous verrons en 2020 si et comment nous pouvons les accompagner pour cette transition.

Dans la région de Kordié, juste au nord de Koudougou, nous soutenons toujours le curé de la paroisse de la commune dans son action éducative et socio-économique et, comme à l’habitude, nous l’aidons pour toute une série de micro réalisations : alphabétisation, latrines villageoises, grillage pour jardin géré par 22 femmes, culture attelée pour 4 villages, 3 motos pompes pour des jardins maraîchers pour respectivement, 12 femmes, 13 et 17 jeunes, 8 sacs de graines de Néré de 100kg chacun pour l’activité de 30 veuves.

Rappelons que les programmes d’alphabétisation accueillent en grande majorité des femmes et des jeunes, ce qui est très bien, mais ce qui est moins bien, c’est que les hommes ne jugent pas utile d’y participer pour des raisons peu claires, paresse, « ce sont des histoires de femme »… Nous avions sermonné une fois tous les hommes du village sur ce sujet mais nous doutons que cela ait beaucoup changé!

Vous remarquerez aussi que ces micro réalisations sont très focalisées sur les femmes car nous sommes convaincus comme la plupart des spécialistes de l’Afrique que l’abandon des coutumes nuisibles au bien-être physique et social des populations (toutes ne le sont pas!) viendra par la formation et l’autonomie donnée aux femmes.

 Enfin, et malheureusement car cela illustre le drame de ce pays, nous avons, à titre exceptionnel, participé à un programme d’aide d’urgence initié par l’Ocades  (Caritas)  Fada destiné à venir en aide à une centaine de réfugiés (on dit PDI : Personnes Déplacées de l’ Intérieur) dans trois villages de la région de Fada dans l’est du Burkina.

Les finances de notre association (tableau en fin du rapport)

Nos recettes, sur la période allant du 1er septembre 2018 au 31 août 2019,  se sont élevées à 73 585€ contre 78 550€ l’année précédente, soit une diminution de – 4 965€.

L’écart vient du Fonds Eau de Lyon qui était en fin d’exécution en 2019 et qui nous a versé un acompte final de 4 000€ à comparer avec les 9 520€ encaissés l’année précédente (-5 520€) : le montant des dons, hors Fonds Eau de Lyon, est donc de  69 585€ contre 69 030€ l’année précédente soit pratiquement le même niveau. A noter le soutien régulier de la Fondation Anber.

 Les dépenses se sont élevées à 73 833€ contre 85 655€ en 2018 soit une diminution de 11 822€ qui s’explique pour l’essentiel par le report sur l’année 2020 (saison des pluies oblige) d’un forage budgété en 2019.

Sur ce total de 73 833€, les frais de gestion représentent 1 431€, soit 1.9% de notre budget annuel, les autres dépenses les plus importantes se ventilant de la manière suivante :

8 094€ pour l’achèvement  du bâtiment du collège de Goundri ainsi que pour des tables et bancs.

15 542€ ont été dépensés pour les programmes des filles de la brousse à Diebougou,

 10 341€ ont été dépensés  sur le programme d’apprentissage des jeunes de Diebougou (forage avec pompe solaire).

13 000€  ont été dépensés pour le second programme de forages et d’assainissement du Fonds Eau pour équiper les 5 villages en forages et latrines

13 980€ pour les micro projets autour de Kordié, activité des femmes, motos pompes etc… (Abbé Bationo)

9 744€ pour les aides aux réfugiés de l’intérieur

Nous avons donc sur l’exercice clos le 31 août 2019, un déficit de – 248€

 Notre solde bancaire à fin août 2019 était de 25 697€ (dont 8K€ sont affectés au forage qui sera réalisé début 2020).

III)  La gouvernance de l’association

 Nous avons la grande tristesse de devoir vous informer que Francis Cambournac,  notre administrateur depuis des dizaines d’années, très proche des fondateurs d’Amitié et Développement, nous a quittés en août 2019 suite à une longue maladie à laquelle il a fait face avec beaucoup de courage.

Francis était venu au Burkina à l’occasion d’un de nos voyages annuels; il était un membre actif du conseil d’administration et ne manquait aucune réunion. Il y participait de manière très dynamique et il faisait tout pour apporter de nouveaux donateurs.

Amitié et Développement était représenté à ses obsèques par son président qui a pu exprimer à sa famille de vive-voix les condoléances attristées du conseil d’administration. 

 

 IV) La situation au Burkina Faso

 Le gouvernement du Burkina a perdu le contrôle de près de 50% de son territoire. Cette situation auparavant circonscrite à la bande nord du pays, d’ouest en est sur une profondeur d’environ 100 kilomètres s’est étendue à pratiquement tout l’est du pays et à d’autres endroits vers le sud. Il y a plusieurs centaines de milliers de PDI (Personnes Déplacées de l’Intérieur) dont le plus grand nombre se trouve dans des camps près de la capitale Ouagadougou. Les attaques se multiplient dans toutes ces zones. L’armée burkinabée est peu opérationnelle et peu sûre du fait d’infiltrations djihadistes en son sein, d’après des sources bien informées.

Le gouvernement pratique le déni sous-estimant gravement la situation en disant que « ce ne sont que quelques incursions venant du nord, du Mali incapable de contrôler son territoire » cachant autant que faire se peut le nombre des réfugiés (aujourd’hui 500.000), et se refusant donc pour des raisons politiques à seulement envisager une coopération efficace avec la France. Ce déni fait que, notamment,  aucune action d’envergure et durable impliquant un soutien extérieur n’est envisagée par le gouvernement pour reprendre le contrôle de tout l’est du pays … puisque le problème serait  seulement au nord près du Mali !

Des campagnes sont régulièrement orchestrées contre la présence de troupes étrangères (françaises en fait) et les interventions françaises (celles-ci ont empêché il y a peu de temps une ville comme Djibo -70 000h – de tomber) sont cachées, minimisées et évitées au maximum.

La population, très inquiète, est tiraillée entre le désir d’avoir une armée (et donc un gouvernement) efficace qui puisse ramener la paix,  ce qui implique une aide étrangère, et le sentiment anticolonialiste fortement teinté de « sankarisme » (du nom de l’ancien président Thomas Sankara) qui s’y oppose. La population souhaite avant tout, cependant,  un Etat fort qui puisse apporter la paix permettant notamment aux réfugiés de rentrer chez eux. Il est donc possible que ce désir  l’emporte au final en facilitant la mise en place de structures militaires et civiles enfin efficaces.  

Le tableau est donc très sombre, inutile de se le cacher sous peine de pratiquer la même langue de bois que celle que pratique le gouvernement burkinabé.

Face à une telle situation, comment se positionne Amitié et Développement ?

Son conseil d’administration s’est réuni ce 15 novembre et a longuement débattu du sujet a adopté la stratégie qui suit:

Prenant en compte notre souci majeur d’être particulièrement présent auprès de la population en ces temps de crise et le fait aussi que nous avons la grande chance de pouvoir nous fier à des partenaires avec qui nous entretenons une relation très ancienne, nous avons estimé que nous pouvions continuer nos interventions pour l’année 2020 comme auparavant.

Certes, nous n’avons pas pu aller sur place en 2019 et il y a peu de chances pour que nous y allions en 2020 (peut-être à Ouagadougou mais pas en dehors de toute manière) mais nous avons considéré que la solidité de notre présence dans le pays, la connaissance que nous avons des sites sur lesquels nous sommes et des intervenants avec qui nous travaillons compensait une absence de voyage pour deux années seulement (il y a dix ans, les voyages n’avaient lieu que tous les 3 ans).

Pour l’avenir plus lointain, nous déciderons le moment venu en espérant que la situation s’améliorera mais il est clair que si ce n’était pas le cas, d’autres décisions stratégiques devront être prises car le contrôle rigoureux de nos actions reste un facteur essentiel pour nous.

Nous comptons donc plus que jamais sur votre générosité.